Au lieu de légiférer en réaction à des crises, l’enjeu est de pouvoir préparer l’apparition d’une société de la longévité et de répondre aux défis :
Les constats partagés et corroborés par les nombreux rapports de ces dernières années appellent une réforme d’ampleur pour engager un changement profond du modèle d’accompagnement et répondre aux attentes exprimées par les Français : priorité affirmée au maintien à domicile, amélioration de la qualité de la prise en charge en établissement, besoin d’être « chez soi » quel que soit son lieu de vie, demande de simplification du parcours et attente d’une plus grande égalité de traitement entre les territoires.
Ces ambitions reposent en grande partie sur l’investissement dans les métiers du Grand Âge dont les problèmes aigus d’attractivité justifient l’urgence à agir et à mobiliser des moyens financiers nouveaux pour renforcer les politiques publiques de soutien à l’autonomie.
La question des choix à opérer en termes de financement justifie en elle-même un débat public et une concertation des citoyenssur ce qui relève d’un véritable choix de société.
Au-delà de cette question financière, c’est un changement de regard sur le grand âge qui doit être engagé, pour favoriser l’inclusion des personnes âgées dans toute l’organisation de la vie en société : logement, mobilité, santé, vie sociale… Autant de domaines qui impliquent la convergence des politiques publiques et la définition de la place des acteurs (par exemple, le rôle des collectivitésterritoriales dans l’aménagement du cadre de vie).
À cet égard, il parait essentiel qu’une loi d’orientation sur le grand âge puisse reposer sur un véritable débat au sein de la société civile qui pourrait relever d’une grande cause nationale ou s’appuyer sur le modèle de la concertation citoyenne pour le climat.
L’importance des enjeux liés au vieillissement suppose de définir collectivement un projet de société pour placer l’autonomie de la personne âgée au cœur d’une stratégie qui garantisse sa liberté de choix et sa dignité.
À l’occasion de la création de la branche autonomie, le rapport de Laurent Vachey a permis d’identifier un certain nombre de « sources de financement à mobiliser prioritairement pour couvrir une réforme du Grand Âge » et d’expertiser les avantages et inconvénients ainsi que le rendement potentiel de chacune des pistes : transferts, mesures d’économies, réduction de certaines niches sociales ou fiscales, mobilisation de financements privés ou éventuels prélèvements obligatoires.
La question du financement constitue le point qui met le plus en tension la décision publique et la volonté politique. Il appartient aux pouvoirs publics de prendre leurs responsabilités pour identifier les ressources et opérer les arbitrages parmi ces pistes, sans exclure celles relatives au patrimoine dont le rapport Vachey a clairement montré qu’il avait davantage progressé que le revenu des français ces 15 dernières années.
Eu égard aux enjeux majeurs précités, la programmation pluriannuelle des moyens dédiés aux politiques de l’autonomie, à travers une loi de programmation budgétaire comme il en existe dans d’autres secteurs, est indissociable du principe d’une loi d’orientation sur le grand âge et l’autonomie.
Pour programmer progressivement la réponse aux besoins de court et moyen terme, notamment sur le renforcement des effectifs, il parait nécessaire de garantir de manière pluriannuelle un taux d’évolution minimum de l’objectif global de dépenses de la branche autonomie supérieur à 6%.
La trajectoire de la branche autonomie devra également prendre en compte l’impératif du développement quantitatif de l’offre : d’après le modèle de projection démographique Lieu de vie et autonomie (LIVIA) de la DREES, il sera ainsi nécessaire de créer plus de 100 000 places ou « solutions d’accompagnement » supplémentaires d’ici à 2030 .
Pour la FHF, il est fondamental que la création de la branche autonomie soit également accompagnée de la mise en place de mécanismes transparents de transferts d’enveloppes et de charges (notamment avec la branche assurance maladie – sous enveloppes établissements de santé comme médecine de ville) capables de donner de la cohérence dans le temps aux politiques publiques nationales comme territoriales.
Un observatoire ou comité de pilotage des agrégats de dépenses publiques de l’autonomie, avec une notion d’« effort national en faveur du soutien à l’autonomie » qui dépasse les seules dépenses de la branche autonomie, permettrait une mise en cohérence des actions et politiques de chaque contributeur - Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) - mais aussi collectivités territoriales. Cette nouvelle instance permettrait également de souligner une démarche « d’investissement dans l’autonomie », tout en objectivant les économies pouvant être réalisées.
Pour la FHF, il est aujourd’hui impératif de réaliser au plus vite cette réforme législative. Les vecteurs budgétaires ou réglementaires ne peuvent pas remplacer une véritable loi de programmation de l’autonomie organisant dans le temps les changements organisationnels (virage domiciliaire, investissement dans les nouvelles technologies, plateforme de services, habitat inclusif…), tarifaires (plus grande forfaitisation et financement contractualisé à la qualité) et institutionnels (simplification de la gouvernance et des autorisations).
Envisager le changement du modèle d’accompagnement de la perte d’autonomie à travers l’approche domiciliaire, c’est répondre à la priorité affirmée pour le maintien à domicile et permettre à la personne âgée de se sentir « chez soi » quel que soit son lieu de vie. Au-delà de simplement « repenser l’EHPAD », cette approche suppose une adaptation systémique de l’offre, incluant les services à domicile qui doivent être renforcés mais aussi une redéfinition des missions et des moyens alloués aux Unités de soins de longue durée (USLD).
En particulier, la priorité accordée au domicile exige de répondre à la fragilité économique des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) mais aussi aux effets de sélection adverse pouvant découler de la tarification actuelle des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD).
Ce nouveau modèle suppose également et surtout de dépasser l’opposition classique entre l’EHPAD et le domicile en développant des formes alternatives et accessibles d’accompagnement ainsi que des dispositifs innovants de soutien renforcé à domicile.
La loi devra nécessairement envisager une simplification des modalités de pilotage, de gouvernance et de tarification des établissements. A l’occasion du regroupement des sections tarifaires soins et dépendance, la FHF considère nécessaire de confier aux agences régionales de santé (ARS) la tarification des EHPAD.
Pour la FHF, ce sont les objectifs de simplification de la gouvernance, d’équité sociale et territoriale mais aussi la nécessité de prendre en compte la dimension sanitaire du parcours de la personne âgée qui doivent guider le choix de l’autorité en charge du pilotage des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS).
C’est au niveau de la planification et de la programmation de l’offre médico-sociale que devrait se positionner l’action commune des Conseils départementaux et ARS avec un rôle de régulation très fort de la CNSA.