Pour que l’investissement ne soit plus la variable d’ajustement de la régulation de l’ONDAM, la FHF propose la sanctuarisation d’une enveloppe fléchée et dédiée à l’investissement au sein de l’ONDAM « Etablissements de santé », à hauteur de 8%. Ce pourcentage correspond à l’effort nécessaire pour garantir un renouvellement fréquent des installations et ainsi permettre aux établissements de rester modernes. Ce taux se justifie également par l’effort financier supplémentaire et nécessaire pour intégrer la responsabilité sociétale des hôpitaux en matière de développement durable sur leur territoire, ce qui implique des pratiques d’écoconception et des stratégies de construction et d’achats « bas carbone » plus onéreuses. L’enveloppe sera dédiée aux investissements de toute nature, qu’ils soient courants ou structurants, pour les bâtiments ou les équipements.
De façon concrète, ce budget sera distribué aux agences régionales de santé (ARS) sur la base de critères populationnels, pour répartir les financements au sein des territoires et ainsi renforcer la décision régionale en matière d’investissement. Ce dispositif de soutien s’apparentera à un mécanisme de subvention amortissable, permettant ainsi de neutraliser les charges qui y sont liées.
La problématique du financement de l’innovation est similaire à celle de l’investissement. Qu’elle soit garantie par des enveloppes identifiées et dédiées (liste en sus pour les médicaments et les dispositifs médicaux couteux, actes de biologie hors nomenclature…) ou non (innovation technologique, innovation organisationnelle, investissements innovants...), la prise en charge de l’innovation a souvent été assurée par ponction sur les financements des activités courantes et a régulièrement servi de variable d’ajustement au respect de l’ONDAM : absence de taux d’évolution des enveloppes ; gels provisoires ou définitifs ; détournement pour financer des activités non innovantes… Les hôpitaux publics sont donc contraints d’autofinancer l’innovation, qui devrait pourtant faire l’objet d’un soutien spécifique.
Il apparait donc nécessaire de réviser les règles de construction de l’ONDAM, afin de poser des objectifs ambitieux pour identifier le périmètre de l’innovation concerné. Cette dernière peut en effet toucher aux investissements, au numérique comme à la recherche.
Les plans de soutien à l’investissement courant ont permis d’organiser le renouvellement et le remplacement du petit matériel des services de soins indispensables, et ainsi d’assurer une offre de soins de qualité. Sans ces plans, faute de budget suffisant, ces investissements sont souvent repoussés pour limiter les dépenses.
Si la multiplication des plans ces dernières années a permis un renouvellement des équipements, la délégation tardive des crédits, et la nécessité pour les établissements de remonter au plus tôt les besoins, n’ont pas toujours permis d’identifier de façon pertinente les besoins. La sanctuarisation, et le renouvellement de cet investissement dans le cadre d’un plan pluriannuel, sont donc nécessaires pour apporter une meilleure visibilité et mieux lisser les investissements réalisés. Ainsi, les établissements pourront rattraper le retard accusé depuis plusieurs années, avec un objectif ambitieux en matière de réduction du taux de vétusté.
L’implication forte de l’Etat pour financer et piloter la construction d’hôpitaux publics dans les années 70-80 a permis de faire émerger un système performant et d’excellence sur l’ensemble du territoire. La mise en place d’une nouvelle gouvernance, avec l’instauration du Conseil national de l’investissement en santé (CNIS), qui remplace le Copermo depuis 2021, permet de poser les bases d’une nouvelle approche des investissements, davantage fondée sur des logiques de parcours et de territoires que sur des critères de performance organisationnelle et économique.
Néanmoins, le CNIS est à ce jour une instance de représentation et de coordination entre les différents projets de soutien à l’investissement, et non une véritable instance de stratégie nationale d’investissement. Le CNIS pourrait devenir une instance d’édiction des objectifs en matière d’investissement en posant de grands objectifs transversaux.
Il apparait nécessaire de confier à une gouvernance dédiée une mission de planification des opérations de soutien à l’investissement, afin de répondre aux besoins de la population. Plutôt que de valider ou non les projets portés par les établissements, son rôle serait davantage d’identifier les besoins à moyen et long-terme, et de s’assurer que l’ensemble des territoires bénéficient d’un soutien à l’investissement quel que soit leur niveau d’activité.
Il existe peu de documents permettant d’apprécier les besoins en investissement des établissements. Les données disponibles sont estimatives, et permettent d’estimer le degré de vétusté des équipements et des bâtiments selon les durées d’amortissement fixées par la norme comptable. C’est donc une approche très abstraite de la durée de vie des installations. Pourtant, deux installations comparables peuvent connaitre une durée de vie bien différente en fonction de leur fabrication, de leur utilisation ou de leur lieu d’implantation.
Pour pouvoir déterminer le soutien à l’investissement nécessaire pour répondre aux enjeux de vétusté, il est nécessaire de disposer de données fiables. Il pourrait ainsi être mis en place un recueil national, renseigné par les établissements de santé, afin d’identifier le niveau d’urgence des remplacements souhaités et les montants associés. Ce document, mis à jour chaque année par chaque établissement, permettrait de disposer d’une connaissance fine de leurs besoins immédiats, mais également de leurs besoins à moyen et long terme. Ces données agrégées au niveau national viendraient alimenter les débats entourant la loi de financement de la sécurité sociale, et mettre en cohérence l’enveloppe dédiée à l’investissement et les besoins réels.
Les collectivités territoriales s’impliquent régulièrement en matière de soutien aux politiques de santé. De nombreuses initiatives d’aide à l’investissement en santé se développent, diversifiant les ressources des établissements pour mener des projets importants en matière d’offre de soins.
Ce soutien aux établissements traduit une volonté politique locale forte de participer au système de protection sociale et au rayonnement local et régional des établissements de santé. Il doit être valorisé et incité, tout en respectant un cadre nécessaire pour garantir l’équité entre les territoires et les acteurs. En effet, des politiques divergentes en matière de santé en fonction des territoires risqueraient d’accentuer les inégalités d’accès aux soins. Pour cela, il est nécessaire que ces soutiens s’inscrivent dans le cadre des orientations définies par les ARS, notamment via le Projet régional de santé et les stratégies régionales d’investissement.
La FHF propose également de démocratiser le soutien à l’investissement par le recours à l’épargne. Celle-ci atteint en effet des niveaux inédits en France. Son utilisation au profit de projets de santé permettrait notamment de lui donner un sens. La FHF propose ainsi la mise en place d’un livret H, fondé sur le principe du Livret A et géré par la Caisse des dépôts et consignation, qui permettra d’assurer une ressource ou offre de crédit stable et pérenne aux projets d’investissement dans le service public hospitalier.