Le secteur public ne bénéficie pas de l’abattement de cotisations sociales (ex : CICE/CITS) dont bénéficient de manière pérenne, depuis la loi de financement de la sécurité sociale 2019, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) des secteurs privés commerciaux et non lucratifs. Sur le champ sanitaire, cette différence est compensée par les tarifs. Or, ce mécanisme de compensation n’existe pas dans le secteur médico-social où la tarification est identique quel que soit le statut des établissements.
Depuis maintenant près d’une décennie, cette situation pénalise les établissements du secteur public, leurs marges de manœuvre et leur capacité d’autofinancement, et limite la capacité d’investir pour moderniser.
La demande de la FHF est de faire bénéficier le secteur public des mêmes avantages que le privé en matière d’allègements de cotisations sociales, à travers un alignement fiscal ou une compensation financière intégrée à la tarification.
Alors que le secteur commercial a un accès large aux marchés financiers pour le financement de ses projets immobiliers, le secteur public a été confronté pendant une dizaine d’années à une réduction drastique des aides publiques à l’investissement (réduction des crédits non reconductibles des ARS, plan d’aide à l’investissement de la CNSA divisé par 4 en 10 ans, suppression des plans Etat/Régions et diminution de l’aide des départements).
En mobilisant 1,5 Md€ sur 5 ans pour l’aide à l’investissement immobilier dans le secteur médico-social, le plan d’investissement du Ségur de la santé traduit l’engagement de l’Etat en faveur d’une modernisation de l’offre devenue inéluctable, en particulier dans le secteur public vers lequel il convient de flécher prioritairement les aides.
Malgré ce changement d’échelle, les besoins sont considérables sur le plan immobilier et nécessiteront de poursuivre cet effort financier dans le temps.
A noter : en retenant une hypothèse de 150 000 places à rénover (un quart de l’offre totale n’a pas connu de rénovation depuis plus de 25 ans), le rapport Libault de mars 2019 évoquait un besoin d’investissement estimé à 15 Mds€ et proposait en conséquence d’augmenter les plans d’aide à l’investissement d’environ 3 Mds€ en 10 ans.
Il s’agit ici de rappeler que le mécanisme de tarification « soins » et « dépendance » des EHPAD, basé sur l’équation tarifaire GIR moyen pondéré soins (GMPS), est identique quel que soit le statut des établissements, alors que certaines charges s’imposent aux établissement publics du fait de leur statut ou de leur participation au service public : c’est par exemple le cas de l’obligation de disposer d’un préposé ou d’un service de protection juridique des majeurs, qui ne pèse que sur le secteur public dans le champ médico-social.
De même, l’accueil inconditionnel dans le service public implique une proportion dans les EHPAD publics de personnes isolées ou en situation de précarité pour lesquels l’accompagnement doit inclure une dimension sociale (et idéalement le recrutement de travailleurs sociaux) qui n’est aujourd’hui pas prise en compte dans la tarification.
Sur le plan des ressources humaines, il faut enfin rappeler que les EHPAD publics sont leur propre assureur, avec un impact financier en cas de remplacement ou des charges supplémentaires pour les établissements qui font le choix d’une assurance statutaire. Ce point est important car son traitement comptable ne fait pas apparaitre les dépenses d’assurance statutaire comme des dépenses de personnel (ce qui justifie le discours selon lequel les charges sociales du secteur public seraient moins lourdes, légitimant d’exclure le secteur public du bénéfice des abattements de charges…).
Il y a donc bien une double peine pour le secteur public qu’il convient de corriger. C’est en effet une des conditions de la pérennité de cette offre.
L’objectif est de faire de la coopération entre EHPAD publics un véritable levier de transformation, de modernisation et de diversification de l’offre sur les territoires, à travers un objectif d’actions coordonnées de ses membres, en lien étroit avec le groupement hospitalier de territoire (GHT).
La FHF soutient le principe d’une mesure législative visant à rendre obligatoire l’intégration des établissements et services médico-sociaux (ESMS) publics dans une forme de coopération renforcée à horizon de 5 ans.
Pour cela, la rénovation des outils de coopération est indispensable : au-delà des objectifs de mutualisation des moyens et fonctions support, les regroupements entre établissements devront obligatoirement contribuer à l’évolution et à la structuration de l’offre publique sur le territoire. A ce titre, ils devront évoluer pour intégrer de façon systématique cette dimension d’organisation et de mise en cohérence de l’offre parmi leurs missions socles (réponse coordonnée aux appels à projets ou à manifestation d’intérêt).
La diversification de l’offre, la facilitation du parcours et la création de passerelles entre établissements et services devront faire partie du « cœur de métier » du groupement de coopération sociale et médico-sociale (GCSMS), qui dispose de la personnalité morale et peut être titulaire d’autorisations.
L’objectif de la démarche est de pouvoir proposer partout une offre publique médico-sociale complète de proximité.
La mesure devra être mise en œuvre avec souplesse, pour s’adapter aux différents contextes territoriaux (notamment urbain / rural), et en faisant confiance aux acteurs. L’initiative du regroupement serait laissée aux gestionnaires. De la souplesse sera également nécessaire dans la définition du territoire et dans la taille du groupement (pas de définition d’un seuil ou d’une taille critique mais un objectif de soutenabilité du pilotage). Pour accompagner ces démarches (moyens humains), et aider à la constitution des groupements, un appui financier devra être mis en place ainsi que des crédits complémentaires pérennes.
Dans une logique de décloisonnement entre les secteurs sanitaire et médico-social, et de construction des parcours, le GCSMS ainsi constitué intégrera aussi les ESMS publics du secteur handicap. De la même façon, il serait possible à un EHPAD isolé, relevant de la fonction publique territoriale, d’intégrer le GCSMS de proximité.
Renforcement du lien avec le secteur sanitaire et le GHT : le groupement médico-social est obligatoirement membre du GHT (statut de partenaire associé) et sera à ce titre partie prenante à la construction et à l’animation du projet médical de territoire, permettant ainsi une participation des établissements médico-sociaux publics autonomes à la construction de l’offre de territoire.
Ces regroupements sous forme de GCSMS, dont l’objectif est d’abord d’organiser l’offre territoriale, seront complétés par la poursuite des directions communes entre établissements publics, qui permettent d’atteindre une taille critique et la mutualisation de fonctions dans une logique d’efficience.
L’objectif de renforcement des moyens des EHPAD impose de développer des coopérations avec le secteur sanitaire : convention du groupement médico-social avec le GHT, inscription dans les filières gériatriques, psychiatriques et liens avec les hôpitaux de proximité, les équipes mobiles (de gériatrie, d’hygiène, en soins palliatifs…) et l’hospitalisation à domicile (HAD). Ce, afin de faciliter le recours à des compétences ou à une expertise externe, à travers une plus forte intégration à la filière gériatrique (cf. ambition 25). En rendant incontournable ces coopérations, il serait possible de créer dans tous les territoires des pôles d’excellence publics de proximité.
En s’appuyant sur le maillage territorial des EHPAD publics et des établissements publics de santé, l’articulation des offres de soins et d’accompagnement disponibles en proximité pourrait être assurée par la création de pôles d’excellence publics.
Comme pour la question de la transformation des EHPAD en « centre de ressources territoriaux », le maillage territorial très dense des EHPAD publics constitue un atout considérable pour le secteur public, en même temps qu’elle lui confère la responsabilité de s’adapter pour répondre en proximité à la diversité des besoins des personnes âgées.
En lien avec les autorités en charge de la planification territoriale de l’offre, le développement de cette offre doit permettre de répondre aux besoins d’accompagnement en proximité pour certains publics spécifiques qui nécessitent des compétences ou une expertise particulières (personnes handicapées vieillissantes, profils psychiatriques vieillissants, troubles cognitifs sévères…).